EXORCISMES ET POSSESSIONS

EXORCISMES ET POSSESSIONS

Le grand retour du diable

 

Le grand retour du diable


Chasser le diable des âmes, telle est la mission de la centaine de prêtres exorcistes qui, en France, sont mandatés par l'Église catholique. Confrontée à une demande grandissante de la part du public, celle-ci vient de rajeunir ses pratiques pour s'y adapter. Aujourd'hui, les évêques font paraître un nouveau rituel, dont LA VIE publie les formules cles. Dossier coordonné par Jean Mercier.

Arrière, Satan !
Deux courants s'affrontent chez les prêtres exorcistes. La tendance «mystique»
qui croit à l'activité de Satan, et la tendance «psychologique», qui la relativise.
On le voit partout. Derrière les piercings de la culture gothique des jeunes «branchés». Dans les pulsions suicidaires de certains ados. Dans tels messages inquiétants tagués dans les cimetières. Le diable fait son retour, avec ses légions de suppôts qui fascinent les médias et flattent nos fantasmes. À l'opposé de ceux qui se réclament de Satan sans complexes, nombre de nos contemporains continuent à se plaindre de ses coups bas. Chaque année, ils sont des centaines à frapper à la porte de l'Église catholique pour supplier qu'on les aide à extirper le Malin de leur vie. Dans chaque diocèse, l'évêque délègue un prêtre pour les recevoir, dont le droit canon précise qu'il doit être «pieux, éclairé, prudent et de vie intègre», et dont l'intervention peut aller jusqu'à l'exorcisme si la possession diabolique est avérée. En Italie, Mgr Bertone, archevêque de Gênes, a fait sensation en annonçant la création d'une task force de plusieurs spécialistes. En juillet 2005, à Rome, les légionnaires du Christ ont organisé une session de formation – à guichets fermés. En cette fin janvier, la centaine d'exorcistes de France se verront remettre la traduction française d'un nouveau rituel, publié en latin par le Vatican en 1999, pour remplacer celui de 1614. Les évêques souhaitent que ce texte, tiré à très peu d'exemplaires, reste confidentiel pour éviter un usage abusif ou folklorique du document par des personnes non averties, ou des charlatans. Averti, et soucieux de rester dans l'ombre, tel est le père C., 51 ans, exorciste officiel d'un diocèse de Normandie. Nous sommes dans un presbytère de campagne. «Je souhaite garder l'anonymat, non pour éviter d'être reconnu dans mes paroles, mais par peur d'être submergé de demandes si vous donnez mon nom…» Ce prêtre souriant mais réservé reçoit depuis deux ans de nombreuses personnes envoyées par le diocèse ou le bouche-à-oreille. Certains viennent même de la région parisienne. «Des chrétiens, croyants mais souvent non pratiquants, se disent confrontés à des faits qu'ils attribuent au démon. Ils sont allés voir des voyants, des guérisseurs. Rien n'a marché. Le gros problème est de discerner s'il y a possession ou pas. Je procède par étapes, sur plusieurs rendez-vous. Premier temps: ces faits sont-ils réels? Cette personne est-elle équilibrée ou délire-t-elle? Je l'écoute longuement, je lui fais vider son sac. Deuxième étape: ces problèmes sont-ils susceptibles d'une explication rationnelle ou pas? La personne qui se plaint de douleurs est-elle allée voir un médecin ? Troisième temps: je lui demande de m'expliquer sa relation à Dieu. Je l'interroge sur la prière, sur sa relation au Christ, aux sacrements.» Contrairement à d'autres exorcistes qui croient que les maux imputés au diable sont une projection imaginaire, le père C. estime que le démon peut prendre le pouvoir sur une âme. «Saint Augustin compare le démon à un chien enchaîné. Si on ne s'approche pas, il ne peut pas mordre. Mais si on entre dans son rayon d'action, il peut nuire. La haine que l'on ressent pour quelqu'un peut lui offrir une porte d'entrée. Si je constate cela chez quelqu'un, je lui demande de changer son cœur. Je rappelle alors que Dieu est une force bénéfique qui a conquis le diable définitivement, et qu'il ne faut absolument pas craindre l'action de ce dernier. Souvent, cette phrase suffit pour créer l'apaisement.» S'il est convaincu d'une forte présence diabolique, il prononce l'exorcisme. Comme pour cette femme jugée saine par les psychiatres, mais agitée par des tentations de profanation de l'hostie. Ou cet enfant de 5ans «tourmenté par des terreurs nocturnes. À l'hôpital Necker, on n'avait rien pu faire. Un psy pour enfants l'avait rencontré. Les parents m'ont prié d'intervenir. J'ai beaucoup hésité. Au bout de trois exorcismes étalés sur plusieurs mois, tous les symptômes ont disparu.» Jusqu'ici, en l'absence du rituel français, il utilisait parfois le texte en latin et une traduction provisoire en français. «Je dis les formules en latin. Il vaut mieux que les personnes ne comprennent pas. Il faut éviter tout ce qui fait sensationnel... J'évite d'ailleurs d'employer un ton de commandement pour l'injonction à Satan.» Le prêtre avoue avoir rencontré des personnes qui sont saisies de comportement hystérique lors du rite. «Le comportement théâtral n'est pas le signe de la présence démoniaque. Les gens vraiment infestés ne font pas les fanfarons.» Le prêtre, qui s'occupe d'une centaine de personnes par an, ne revendique aucune réussite personnelle: «C'est le Christ qui agit par sa grâce, ce n'est pas moi.» 
Le père Maurice Bellot est, depuis 1994, responsable de l'Accueil Saint-Irénée, au Quartier latin, à Paris. Ce lieu prend en charge chaque année près de 1500 personnes de la région parisienne, les diocèses franciliens ayant opté pour un service commun. Ici, le ministère de l'exorcisme est confié non à un prêtre seul, mais à une équipe, qui compte trois prêtres, quatre religieuses et six laïcs. Dans un premier temps, les gens ne sont pas reçus par le prêtre, «pour éviter le côté magique et permettre un éclaircissement des démarches. Le mot d'exorcisme est piégé: il sous-entend que le prêtre est une sorte de magicien supérieur qui, en actionnant le rituel, va débarrasser les gens de ce qui les embête! En fait, la personne qui se croit possédée sera rassurée si vous la renforcez dans cette idée!», tonne cet homme au large sourire, qui affirme ne jamais avoir pratiqué le rite, mais seulement prié avec les demandeurs. «Je crois à l'existence du diable, mais je n'ai jamais eu la certitude morale d'être devant Satan en personne. On voit des gens qui se sentent envoûtés, ensorcelés, qui mettent le nom de Satan sur toutes sortes de détresses et de misères. Certains s'imaginent que Satan est le Dieu du Mal, qui s'oppose au Dieu du Bien. Mais c'est faux.» Le père Bellot estime que la demande cache toujours des problèmes graves. «Le prêtre doit avoir renoncé à son pouvoir pour être au clair face à cette demande.» Il refuse l'idée de la toute-puissance de la prière : «Celle-ci n'est pas une machine.» Et prône la prudence: «En toute rigueur de termes, il faudrait procéder à une expertise psychiatrique avant. Sinon, on risque de faire du mal.» Il n'a pas de mots assez durs non plus contre les «tradis» qui voient le démon partout: «Ces gens-là utilisent le rite comme un outil de diagnostic: si la personne se roule par terre, ils en déduisent la présence du démon. C'est aberrant!» Cet inconditionnel des sciences humaines est persuadé que sa mission est de rassurer les gens et de les délivrer de leurs fantasmes: «J'ai fait mon boulot si j'ai réussi à faire douter quelqu'un de la puissance de son démon intérieur, à le libérer d'une croyance au Mal qui le rend malade.» Deux courants s'affrontent donc: la tendance «mystique», qui croit à l'activité de Satan, et la tendance«psychologique», qui la relativise. Ils reflètent un conflit entre deux visions de ce qu'est le prêtre, la prière, la liberté humaine. Mgr Philippe Gueneley, évêque de Langres et chargé du dossier de l'exorcisme au sein de l'épiscopat, ne nie pas cette évidence: «Il existe un écart entre ceux qui relativisent trop la réalité satanique, au risque de tout reporter sur les phénomènes psychosomatiques, et ceux qui la survalorisent, au risque de diminuer la responsabilité personnelle de l'homme au profit de l'action du démon. Mais ces différences sont positives et ne sont pas séparatrices.» En France, le courant représenté par le père Bellot est largement majoritaire, mais de plus en plus d'exorcistes récemment nommés n'opposent pas le diabolique et le psychologique, comme l'exprime l'un d'eux, du nord de la France: «On ne peut pas réduire les problèmes des gens à leur dimension psychique. En effet, Satan utilise nos failles pour nous manipuler, et il peut se cacher derrière des symptômes psychologiques.» Même avis chez l'exorciste du diocèse de Nice, par ailleurs aumônier de l'hôpital psychiatrique local: «Il y a des troubles que l'on ne peut pas expliquer par la médecine ou les sciences humaines. Des médecins chefs en psychiatrie font appel à moi dans certains cas. Il s'agit d'aider à lever l'obstacle qui existe dans la vie des gens en priant avec eux.» Ce prêtre nommé à l'« exorcistat » estime que la formation assurée par la conférence épiscopale en France est trop théorique. Il a décidé de se spécialiser à Rome, auprès d'un homme de l'art (Giancarlo Gramolazzo, voir page 23). «Pour l'instant, je ne l'ai réellement pratiqué qu'avec lui. On n'apprend bien ce métier qu'en voyant faire, comme un artisan.» 
Face à une demande en forte hausse – même si aucune statistique n'est publiée – l'offre abonde au-delà de la centaine des exorcistes dûment estampillés. Certains, dont le ministère a été transféré à un collègue, continuent d'exercer. Des laïcs sont convaincus également de détenir des «charismes» et souhaitent soulager leur prochain. Officiellement, ils n'ont pas le droit de pratiquer et doivent s'en tenir à des «prières de délivrance», dans lesquelles Satan n'est jamais interpellé frontalement. Ces prières peuvent être dites par n'importe quel prêtre ou laïc. Des communautés comme les Béatitudes ou les Frères de Saint-Jean sont connues pour leur expérience de la libération spirituelle. Le Centre national de pastorale liturgique va publier un recueil de prières autorisées pour «cadrer» les pratiques, qui sera disponible pour le grand public. 
L'Église catholique ne redoute rien plus que des drames qui la discréditeraient. Les dérives existent: en janvier 2005, quatre membres de l'Église du christianisme céleste (secte néoprotestante) ont été mis en examen après une tentative de chasser le mal 
d'un adolescent qui s'est soldé par un décès. En Roumanie, une nonne est décédée des suites d'un exorcisme sauvage opéré dans un monastère orthodoxe. Satan en rit encore...

Les trois formules qui font reculer le Malin
En exclusivité, La Vie révèle les formules que l'Eglise vient de promulguer en France pour expulser des âmes«l'ennemi du salut, le prince de ce monde».
«Je te conjure, Satan, ennemi du salut des hommes
Reconnais la justice et la bonté de Dieu le Père,
Qui, par son juste jugement a condamné 
Ton orgueil et ton envie ;
Quitte ce serviteur (cette servante) de Dieu 
(ici on prononce le nom de la personne)
Le Seigneur l'a fait à son image,
L'a paré de ses dons
Et, par miséricorde, l'a adopté comme son fils (sa fille).
Je te conjure, Satan, 
prince de ce monde 
Reconnais la puissance et la vertu 
de Jésus-Christ, qui t'a vaincu dans le désert,
A triomphé de toi dans le jardin,
Sur la croix, t'a dépouillé,
Et, se relevant du tombeau,
A transporté tes trophées 
au royaume de la lumière ;
Retire-toi de cette créature 
(ici on prononce le nom de la personne)
En naissant, Il a fait d'elle son frère (sa sœur)
Et en mourant, Il l'a fait(e) sien (sienne), 
par son sang.
Je te conjure, Satan, 
qui trompes le genre humain 
Reconnais l'Esprit de la vérité et de la grâce,
Qui repousse tes embuscades
Et embrouille tes mensonges ;
Va-t'en de cet humain créé par Dieu 
(ici on prononce le nom de la personne)
Il l'a marqué du sceau d'en haut ;
Retire-toi de cet homme (de cette femme) :
Dieu, par l'onction spirituelle,
A fait de lui (d'elle) un temple sacré.
Retire-toi donc, Satan !,
Au nom du Père, du Fils 
et du Saint Esprit,
Retire-toi par la foi
Et la prière de l'Église ;
Retire-toi par le signe 
de la sainte Croix
De notre Seigneur Jésus Christ,
Qui vit et règne pour les siècles des siècles.
Tous répondent : Amen.»
 
La version originale du texte sur l'exorcisme: 
De exorcismis et supplicationibus quibusdam 
(Des exorcismes et des prières qui s'y rapportent).
Edition 2004 de la librairie éditrice du Vatican. 
Traduction de Marie Zawisza pour La Vie 
C'est un élégant livre à la couverture en simili cuir rouge. Son titre s'inscrit en lettres d'or : De exorcismis et supplicationibus quibusdam. Depuis 2004, on peut acquérir pour 13e à la librairie du Vatican cette édition définitive du nouveau rituel de l'exorcisme validé par Jean PaulII en 1998. La traduction française sort ces jours-ci, mais ne sera diffusée qu'aux évêques et aux exorcistes patentés. L'événement est historique, car ce texte met un point final à l'immense entreprise de rénovation des rituels liturgiques décidée par le concile en 1964! Jusqu'ici, les exorcistes francophones travaillaient avec des textes provisoires proposés à l'essai. Ce nouveau rituel est moins théâtral que celui de 1614 : il réduit 
les injonctions à Satan, mais augmente les prières s'adressant à Dieu, au grand dam des traditionalistes, qui le trouvent moins efficace. L'Église exige de ne procéder à l'exorcisme qu'en cas de certitude de possession – dont les signes peuvent être : «parler ou comprendre des langues inconnues, découvrir des choses éloignées ou cachées, démontrer une force physique supérieure à la normale, l'aversion véhémente envers Dieu, la Vierge, les saints, la parole de Dieu, les images sacrées...» L'existence d'une maladie psychique doit être écartée. Le rite se présente comme une longue intercession, qui peut se pratiquer en présence de plusieurs personnes, par exemple les proches du possédé. Il commence par une prière, puis la bénédiction de l'eau et l'aspersion du possédé. Il se poursuit par la litanie des saints, la récitation de psaumes, la lecture de l'Évangile. 
Le prêtre impose les mains sur la tête du possédé, puis tous récitent le Credo et 
la renonciation à Satan. Après le Notre Père, l'exorciste impose la croix et demande 
aux esprits mauvais de partir, avant de souffler sur le visage de la personne. L'exorcisme proprement dit commence par une prière de supplication s'adressant à Dieu et se termine 
par trois interpellations de Satan (voir ci-contre). L'ensemble se clôt sur le Magnificat et la bénédiction finale. Ce nouveau texte met fin à la distinction de jadis entre 
«grand exorcisme» – le rituel qui insère les interpellations à Satan – et le «petit exorcisme» – qui n'en comporte pas, et que l'on appelle aujourd'hui « prière 
de délivrance »


Ne pas confondre, sous peine d'enfer… 
Gothique 
Contre-culture libertaire cultivant la tristesse romantique et le macabre, dans le sillage de Baudelaire, Lautréamont, Edgar Poe. Née en Angleterre dans les années 1970-80, 
le gothique connaît un certain succès chez les adolescents français. Drapés 
de noirs, arborant tatouages, piercing, pentagrammes (signe du diable) et breloques sulfureuses, les « goths »promènent leur teint cadavérique accentué par une chevelure de jais. Issus de milieux privilégiés, ils sont scolarisés. Il n'y a pas de gothiques dans 
les cités, on trouve parmi eux très peu d'immigrés. Minoritaires et caricaturaux, ils incarnent néanmoins l'attrait des jeunes, fans d'ésotérisme et de mondes parallèles, de l'heroic-fantasy aux univers gore en passant par le spiritisme, pour un certain satanisme 
dont ils ne perçoivent souvent pas, au-delà du folklore, les réels dangers.
Spiritisme 
Si les rumeurs sur les maisons hantées et la nécromancie ne datent pas d'hier, une vague spirite, appelée channeling, a débarqué sur l'Occident dans les années 1960 avec le New Age. Son but : nouer des alliances tacites avec des âmes défuntes ou bien des esprits, malfaisants le plus souvent. Simple curiosité malsaine, envie de se faire peur? Attention aux dérives. Fuir le réel pour se réfugier dans l'étrange peut se révéler dangereux chez certains adolescents fragiles. 
Satanisme
Le satanisme remonte à la sorcellerie médiévale. Il existe aussi un satanisme rationaliste, né en France à la cour de Louis XIV avec les messes noires de l'abbé Guibourg (1603-1683). Satan y figure comme conscience supérieure affranchie de la religion et de la morale. Son symbole est la croix inversée, son mythe, l'antéchrist. Un troisième satanisme est né aux États-Unis, en 1966, avec l'Église de Satan d'Anton LaVey et sa Bible 
de Satan. À sa mort, «l'Église» prit une dimension politique. Au programme : révisionnisme, stratifications sociales, éradication des religions, rétablissement de la peine de mort, du bagne... À la suite d'une scission, Michael Aquino fonda le Temple de Set. Attaché au nazisme, il prône un ésotérisme noir. Ces organisations n'ont pas de siège en France, mais des adeptes qui commettent des crimes cannibales et nécrophages, 
des assassinats, des pratiques sexuelles perverses. Il existe des groupuscules plus dangereux encore, selon les spécialistes, comme le Jihad 666. Paramilitaires, ils n'ont rien de libertaire. Ils communiquent via Internet et des fanzines. I.F.

Diables en tous genres
Asmodée 
C'est «le pire des démons» dans l'Ancien Testament (livre du Tobie 3, 8). Le nom Asmodée est tiré du persan. Les emprunts aux croyances et mythologies étrangères sont courantes dans l'Antiquité. En hébreu, il signifie«celui qui fait périr».
Azazel 
Il est mentionné dans la liste des démons établie par l'Église lors du concile de Braga (560), au Portugal. C'est à lui qu'est envoyé un bouc émissaire selon le rite expiatoire hébreu décrit dans le Lévitique.
Belial 
Il rassemble sous son nom une multitude de démons anonymes de l'Ancien Testament. Dans les manuscrits de Qumrân, il est le «Prince du mal», et tient la place de Satan. L'imagerie médiévale en fait un démon d'apparence séduisante, donc
particulièrement redoutable. 
Belzébuth 
Le nom provient d'une des figures du Dieu cananéen – population de l'Israël antique avant l'arrivée des Hébreux – Baal : «Baal-Zeboul». En concurrence avec Yahvé, il est assimilé chez les Hébreux à un démon, chez qui il devient ironiquement «Baal-Zéboub» : le «Seigneur des mouches».
Démon 
Signifie esprit en grec daimôn, mais pas forcément mauvais. Dans la mythologie gréco-romaine, les démons étaient des esprits intermédiaires entre les dieux et les hommes. Le christianisme n'en a conservé que l'aspect négatif et malfaisant. 
Lucifer 
Signifie en latin «porteur de lumière». Ce nom apparaît dans la traduction latine de la Bible, la Vulgate, de saint Jérôme, au IVe siècle, pour rendre compte du mot heyel, la planète Vénus en hébreu (livre d'Isaïe 14, 12). Un tyran déchu est alors comparé à un astre qui tombe. Par extension, Lucifer devient au Moyen Âge le plus grand de tous les anges qui, par orgueil, s'est retourné contre Dieu.
Diable 
Le mot grec diabolos signifie l'« accusateur », soit le synonyme du mot Satan en hébreu. L'étymologie renvoie à ce qui «divise».
Mammon 
Il s'agit d'un nom araméen (la langue maternelle de Jésus) du diable, laissé traditionnellement en l'état dans les traductions en langues profanes. Il symbolise l'argent, 
dans le discours du Christ (Matthieu 6, 24).
Méphistophélès 
Il est présent dans la littérature allemande dès 1587, dans un livre populaire. Faust s'allie avec le démon Méphistophélès. Cela lui confère des pouvoirs magiques mais précipite sa chute. Thème repris dans le Faust, de Goethe (1790).
Satan 
Signifie «adversaire, accusateur» en hébreu. Qui ne connaît pas l'injonction latine «Vade retro Satana»,«Arrière, Satan !», extraite de Matthieu, selon la Vulgate? Dans Zacharie 3, 1-2, Satan est un accusateur de la justice divine. Il est absent de l'iconographie chrétienne des premiers siècles. La première image de Satan date du VIe siècle, sur les murs de l'église de Baouït en Égypte, et n'a rien d'effrayant. À partir des XIe et XIIe siècles, 
on assiste à une multiplication des représentations animales et humaines de Satan. 
Succube 
Un succube est un démon qui prend la forme d'une femme pour séduire 
un homme durant son sommeil. Son pendant masculin est l'incube. Au Moyen Âge, on a cru voir dans les troubles du sommeil des manifestations de ces démons. 
Le Tentateur 
Le premier tentateur est le serpent – mot qui signifie aussi en hébreu «rusé» – dans la Genèse. Provoquant Ève, il lui fait manger du fruit de la connaissance du bien et 
du mal. F.M.

«Mes vingt-neuf ans de face à face avec Satan »
Giancarlo Gramolazzo préside l'Association internationale des exorcistes. Depuis vingt-neuf ans, à Rome, il se bat contre le malin, par la prière… et le bon sens.
Les lunettes noires sur son visage émacié lui donnent un air d'espion. Quand il parle, ses mots sont déformés par une sorte de paralysie faciale qui l'oblige à grimacer malgré un sourire lumineux. Giancarlo Gramolazzo, 61ans, président de l'Association internationale des exorcistes, à Rome, est un personnage attachant qui nous reçoit dans son bureau de directeur d'une maison de retraite sur les hauteurs du Janicule. Presque une«couverture» pour celui qui a ses entrées au Vatican. Sur le flanc du bâtiment, une porte dérobée donne sur une chapelle privée où le prêtre guide des âmes qui se plaignent des assauts du Malin. Depuis vingt-neuf ans, le père Gramolazzo ne désarme pas devant les puissances des ténèbres. Jeune, il s'est formé auprès du célèbre Don Candido Amatini, aujourd'hui décédé. «La vraie possession est très rare, mais elle existe. 
Le “possédé” parle des langues qu'il ne peut connaître, ou vomit des objets, comme des morceaux de verre, des vis en métal. Je me souviens d'une jeune fille qui a craché une pomme entière dans un état intact. Il y a aussi la force surhumaine. Ces phénomènes spectaculaires n'ont rien à voir avec les gesticulations du film L'Exorciste! 
Le démon peut agir par l'obsession (des idées fixes de suicide, de haine, 
des fantasmes sexuels) ou l'infestation (de lieux). Il se peut que certaines maladies aient une racine démoniaque, même s'il ne faut pas généraliser. Je pense à certains cancers dont j'ai constaté la guérison après plusieurs exorcismes.»
 Le travail d'écoute du père Giancarlo peut être de longue durée: «J'accompagne certaines personnes pendant 
des années.»
 En Italie, qui compte plus de 400 prêtres exorcistes, le rite est plus banalisé qu'en France. 
«La plupart du temps, je le conduis en présence de la famille. Mon ministère est un travail d'éducation. La ruse du démon est de faire croire qu'il est plus fort que Dieu. Les gens tombent dans le piège et prennent peur. Je leur explique que cette peur est infondée car Dieu a vaincu le démon par la croix. Je rappelle toujours que son mode d'action ordinaire est la tentation. Tout le monde est concerné par ce combat-là. Pour moi, recevoir 
le pardon de Dieu dans la confession équivaut à un exorcisme. Et parfois, c'est même plus efficace.»


Pour aller plus loin
- DVD 
Exorcisme et Prière de délivrance 
un bilan intéressant, avec 
le concours de Mgr Philippe Gueneley, responsable 
du dossier de l'exorcisme 
au sein de l'épiscopat. 
Witness Production.com ; 
Tél. : 02 51 05 96 33.
- Questions actuelles
Dossier Satan, numéro 24 
(mars-avril 2002), 5,35€ : L'ensemble des textes 
de référence de l'Église catholique sur le sujet.
- Guérison et Exorcisme, comment discerner ? 
de Philippe Madre. 
Un panorama sur le ministère de la délivrance des esprits mauvais, par 
l'une des figures du Renouveau charismatique, 
Éd. des Béatitudes, 15€.

Comment juifs et musulmans voient le démon
Il a fallu au Satan des juifs quelques livres pour atteindre sa pleine puissance et gagner son indépendance. Alors que le mot ne renvoyait qu'à un adversaire ou une personne hostile dans le Pentateuque, il désigne, dans les autres livres bibliques, un être surnaturel, siégeant à la cour céleste de Yahvé. Totalement subordonné à Dieu, il joue devant lui l'accusateur de l'homme («shatan» désigne d'ailleurs le procureur dans un procès). Peu à peu, il va s'«émanciper» et pousser l'homme à désobéir à Dieu. C'est lui qui, dans le livre des Chroniques par exemple, encourage David à persécuter Israël. Le livre de la Sagesse le présente comme l'origine du mal, ennemi de l'homme et de Dieu. Le Talmud, puis la kabbale décrivent des cérémonies d'exorcisme pratiquées par des rabbins, mais le rationalisme occidental a atténué ces croyances. Le diable judéo-chrétien n'a pas manqué d'inspirer l'islam. D'après le Coran, l'Iblis (ou Chaytan) des musulmans fut banni du paradis pour avoir refusé de s'incliner, comme les autres anges, devant Adam à la demande de Dieu. Il devint alors le chef des djinns maléfiques, démons nés du feu ; le croyant se distingue par sa résistance à leurs tentations. On peut chasser les djinns qui ont momentanément pris possession d'une personne en récitant des sourates qui«consument» les esprits malfaisants. Mais certains rituels sont mal perçus par les musulmans orthodoxes qui les considèrent comme des survivances de croyances pré-islamiques. Iblis n'incarne pas le mal à proprement parler, mais il incite, 
sans relâche, l'homme à la faute. C.de B.



20/05/2015
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