LES CONFIDENCES DU PRÊTRE EXORCISTE DU DIOCÈSE DE BAYEUX-LISIEUX
Les confidences du prêtre exorciste du
diocèse de Bayeux-LiSIEUX
Frère Jean-Pierre Larsonneur, comment devient-on prêtre exorciste ?
J’ai été nommé pour la première fois en 1982 dans le diocèse de Charente. Puis à nouveau en 2002 quand je suis revenu dans le Calvados. J’ai donc toujours été exorciste. Ce n’est pas un ministère que l’on choisit, ce sont les évêques qui vous nomment. Ma formation de psychologue clinicien et mes compétences dans le domaine spirituel ont certainement joué dans la décision. A mon arrivée ici, j’ai demandé à travailler avec une équipe pour ne pas être seul à vivre ces moments-là. La première année nous étions 4 ou 5. Aujourd’hui nous sommes 7, avec notamment un psychiatre. Tous savent écouter, prier avec les autres, et ont le sens de l’église.
Vous, Jeanne, vous êtes une laïque membre du service exorcisme. Qu’est-ce qui vous a poussé à l’intégrer ?
J’étais thérapeute, j’ai donc passé beaucoup de temps à écouter les gens qui souffraient pour les aider à retrouver du sens à leur vie. J’ai aussi été membre pendant 15 ans d’une structure à Caen où j’avais reçu une formation liée à l’accompagnement spirituel. C’est l’évêque, Monseigneur Boulanger, qui m’a proposé d’intégrer le service.
Concrètement, qu’est-ce que l’exorcisme dans l’Église catholique ?
Dans la foi catholique, on croit à l’existence d’êtres spirituels qui soit adhèrent pleinement à une vie qui se reçoit de Dieu, soit font tout le contraire. C’est ce qui fait la différence entre les anges et les démons.
Ces démons, comment peuvent-ils prendre possession de quelqu’un ?
Le démon n’a pas véritablement de prise sur les personnes indépendamment de leur volonté. Ce n’est pas un être qui vous saute dessus, il faut adhérer à ce qu’il promeut, la toute-puissance, le pouvoir, le fait d’écraser l’autre… Les gens se laissent posséder. Ils ouvrent les portes. L’exorcisme est donc fait pour quelqu’un qui a choisi de travailler avec le diable.
Votre formation de psychologue clinicien doit vous aider à discerner ceux qui ont des maladies mentales de ceux qui sont réellement possédés…
Oui c’est une compétence, mais l’essentiel est d’être en intimité avec le Christ et d’avoir du bon sens. Il y a des points de repère de pathologie. Mais quand c’est de l’ordre du spirituel, c’est plus une volonté de refuser tout ce qui peut rapprocher de Dieu et qui conduit peu à peu à la destruction de soi. Des personnes vraiment possédées, j’en ai très peu rencontré. Par contre, des gens qui ont été influencés par le malin, je peux en voir.
Comment travaillez-vous avec les personnes qui viennent chercher votre aide ?
On les écoute, on cherche à comprendre d’où peut venir ce sentiment d’être possédé. À travers leurs itinéraires, on voit quels sont les chemins qu’ils ont pu emprunter et qui les ont entraînés sur une mauvaise voix. Cela peut être une pratique ésotérique, des pratiques sataniques. C’est aussi l’alcool, la drogue, le sexe. Ce sont toutes des portes d’entrées qui peuvent conduire à la destruction d’eux-mêmes mais aussi de leur relation avec les autres.
La grande majorité des personnes que vous rencontrez ne sont donc pas possédées mais plutôt en souffrance ?
Frère Jean-Pierre Larsonneur : On est face à une véritable souffrance en profondeur, ce sont des gens qui se sentent écrasés. Les situations qui seraient surmontées par certains sont tellement vécues de façon douloureuse par d’autres qu’ils y voient le mal et le diable, ou le fait qu’on leur a jeté un sort. On est donc là pour les aider à découvrir que ce ne sont pas toujours les autres qui portent la responsabilité de leur situation. Et pour les remettre dans un chemin de confiance.
Jeanne du Boullay : La proportion de ceux qui ont une pathologie n’est pas très importante finalement. C’est souvent un problème de sens de l’existence. On a perdu aujourd’hui le sens de la vie, qui n’a jamais été faite que de bonheurs.
Avez-vous déjà rencontré le diable ?
Le diable ? J’ai dû le rencontrer mais jamais de visu. Je sais qu’il est tout autour de nous. Mais il n’a pas de pouvoirs directs, il ne peut passer que par nos failles. Il fait naître la peur, d’où l’enjeu de la confiance en Dieu.
Pratiquez-vous le rituel exorciste dans le diocèse de Bayeux-Lisieux ?
Le rituel est variable selon les situations. Le grand exorcisme, je n’ai jamais eu l’occasion de le faire ici. Mais j’ai fait des prières de délivrance, de guérison, de soutien. Les situations ne sont pas coupées au couteau. En citant le « Notre père » par exemple, vous faites déjà un exorcisme en disant « délivre nous du mal ». Ce mot-là, rituel, recouvre donc plein de situations très différentes.