Ancien prêtre exorciste du diocèse de Lyon, de 1997 à 2006, le père Henri Amet, 80 ans, est un « faux retraité », puisque, comme il l'explique, « avec la permission de l'archevêque, je continue à être consulté pour des exorcismes et à recevoir des gens ». Auteur du livre « Faut-il avoir peur du diable ? », il donnera une conférence ce soir (à 20h30) à la chapelle du Martrou, à l'invitation de la librairie « La Sainte Famille ». Entretien.

Quel a été votre parcours et comment êtes-vous devenu prêtre exorciste ?

J'ai mené jusqu'à mes 65 ans une carrièrede prêtre jésuite destiné à l'enseignement et à la gestion. J'ai ainsi dirigé les collèges jésuites de Vannes, Bordeaux et Marseille. à l'issue de ce parcours, mes supérieurs m'ont confié un ministère de direction spirituelle et de confession, avec la charge d'exorciste du diocèse de Lyon. Il n'y a pas de « candidature » pour devenir prêtre exorciste : c'est l'évêque qui nomme à cette charge très difficile, qui exige de la prudence et de l'expérience, une certaine sagesse. Et en ce qui me concerne, je ne m'y attendais pas du tout.

Avec votre expérience, comment pourriez-vous définir le diable ?

Mon opinion est celle de l'Eglise, qui a toujours admis l'existence du diable. Mais on ne peut en dresser de « portrait robot » : il faut oublier l'image d'épinal du diable fourchu et cornu. On juge plutôt de son existence et de son action par les effets et l'étendue du mal dans le monde. Le diable n'est pas l'auteur mais l'inspirateur du mal. Cela suppose d'admettre l'existence de la perversité humaine.

y a-t-il des « symptômes » de la « possession » ?

Tout ce qui est véhiculé par les médias et le cinéma est caricatural. Ce n'est pas parce qu'une personne hurle et s'agite en tous sens qu'elle est possédée par le démon. Le plus souvent il s'agit plutôt d'hystérie ou de signes de maladie mentale. mais le démon peut s'infiltrer sournoisement dans nos fragilités psychiques. Et il y a des cas de « mélange », où l'on est à la limite du psychologique, du spirituel et du diabolique. Le rôle de l'exorciste consiste alors à faire preuve de discernement pour voir ce qui est vraiment d'ordre spirituel dans une maladie psychique.

Ne rencontre-t-on de cas de « possession » que chez les catholiques ?

Non, il m'est arrivé de recevoir des juifs, des musulmans, beaucoup de non pratiquants, ou des non croyants. la plupart des gens que je rencontre ne se disent pas possédés par le démon mais ensorcelés : « Tout va mal dans ma vie, on m'a jeté un sort ». Il n'y a pas besoin d'exorcisme dans de pareils cas, on pratique plutôt une prière de délivrance, c'est une des différences sur lesquelles j'insisterai ce soir.

Concrètement, comment se passe un exorcisme ?

Il s'agit d'un rituel fixé par Rome, qui n'est pas public, mais auquel peuvent parfois assister des membres de la famille. On appelle cela un sacramental, cela se passe dans une chapelle ou un petit oratoire, cela ne dure pas plus d'une vingtaine de minutes et tout se passe en français. On demande à Dieu la délivrance de la personne : lecture de prières, aspersion d'eau et on conclut par une prière d'action de grâce.

Alors, faut-il avoir peur du diable ?

Non, à condition d'être fixé sur Jésus-Christ : Dieu est plus fort que le diable qui est une créature de Dieu déchue. Mon livre est d'ailleurs davantage consacré à Jésus-Christ, sauveur et vainqueur, qu'au diable proprement dit.

Recueilli par M. A.

« Faut-il avoir peur du diable ? », aux éditions Nouvelle Cité, 122 pages, 15€.

source: La Dépêche du Midi