EXORCISMES ET POSSESSIONS

EXORCISMES ET POSSESSIONS

Le diable est leur ennemi

Le diable est leur ennemi



Vous avez dit exorcistes... Non, il ne s’agit pas seulement d’un film d’horreur à succès des années 80. Les exorcistes existent très officiellement. Ils sont même de plus en plus nombreux aujourd’hui en France, et font ces temps-ci le succès d’émissions de télévision à sensation. Mais les exorcistes ne ressemblent plus guère à leur image d’Epinal. Ils utilisent très peu l’ail, le sel et l’eau bénite. Et si à la question "Le diable existe-t-il?", pas un ne répond par la négative, c’est plutôt du côté de la psychologie, de la psychanalyse, de l’accueil et de la prière qu’ils vont chercher la réponse au mystère du mal. Voyage à la découverte de prêtres pas tout à fait comme les autres...

Allo, le bureau du prêtre exorciste? Mon Père, j’aimerais pouvoir vous rencontrer, je viens d’emménager et j’ai des odeurs étranges dans ma maison, nous sommes très inquiets..." "Allo, mon Père, ici Madame X, je vous appelle à propos de mon frère qui se dit toujours possédé par le diable. Maintenant, il m’agresse et s’en prend de plus en plus à moi..." "Allo, Père, je voudrais avoir un rendez-vous avec vous, je suis peut-être envoûté..." Quelques minutes sur le répondeur téléphonique d’un prêtre exorciste, quelque part en France. 
Envoûtements, présence satanique, possession: des mots qui ont encore cours? Au Moyen Age, on ne comptait pas les récits de moines tourmentés nuitamment par le démon. Au siècle dernier, "le grappin" tirait le curé d’Ars par les pieds, dans sa chambre. A-t-il disparu aujourd’hui? Apparemment, non! En janvier dernier, un conducteur de bus de Lyon a tenté de tuer un de ses collègues, persuadé qu’il lui avait jeté un sort. Tous deux étaient adeptes de cérémonies occultes. En octobre 1991, un jeune chômeur de Strasbourg a tué et mutilé son amie à coups de crucifix. Depuis quelques temps, il téléphonait à son père pour lui dire que Satan était en lui... Quelques mois plus tôt, c’est toute une famille du Pas-de-Calais qui, cherchant à se délivrer d’un envoûtement, s’était enfermée chez elle pour se livrer à d’étranges cérémonies et engloutir un volume ahurissant d’eau. Bilan: un mort.
Dans tous ces faits divers, est-ce vraiment le diable qui tire les ficelles? En tout cas, nos contemporains semblent manifester pour lui un réel intérêt. Les sondages en donnent une idée: plus d’un Français sur trois tient l’existence du diable pour certaine ou probable (sondage Panorama en 1990). Ils sont 66% parmi les catholiques pratiquants. Une personne sur dix dit avoir "l’impression d’être, à certains moments, sous l’influence du diable". Autre chiffre révélateur : aujourd’hui, 71 diocèses sur 93 ont un exorciste officiel, alors qu’ils étaient moins de dix en 1950.
Le père Louis Costel est l’un d’entre eux, exorciste du diocèse de Coutances. Le Cotentin, ses marais, ses brumes, un pays rural où courent des rumeurs ancestrales d’envoûtements, de "dames blanches" et de maisons fantômes... Le décor idéal pour rencontrer l’exorciste de nos fantasmes. Mais Jullouville, ravissante petite station balnéaire proche de Granville, ne ressemble pas à une ville fantastique, et le père Louis Costel n’habite pas une demeure frappée d’étrange mais un presbytère clair et calme sous les pins, à côté d’une jolie chapelle. Il le reconnaît: c’est un peu sa passion, disons littéraire, pour le diable qui lui a valu voilà cinq ans d’endosser le rôle d’exorciste. Louis Costel est, en effet, l’auteur de plusieurs romans aux titres explicites: La main du diable, Un cas d’envoûtement... Mais pas de quoi justifier une vocation. Soudain grave, Louis Costel confie qu’il n’avait jamais pensé être appelé à ce poste: "Un évêque ne le confiera d’ailleurs jamais à quelqu’un qui le demande", dit-il.
C’est le mal, la misère et la souffrance que l’exorciste rencontre quotidiennement. Louis Costel a reçu près de six cents personnes, dont un tiers de ruraux. Trois ou quatre fois, il a vu des individus qui disaient être possédés du diable, mais jamais lui ne l’a "rencontré". Il n’a donc jamais pratiqué le fameux grand exorcisme qui fait les choux gras des médias. Dans son livre, Car ils croyaient brûler le diable en Normandie, il raconte la cérémonie hallucinante à laquelle est soumise une prétendue sorcière, sous Louis XIV. Yeux révulsés, écumant, se tordant comme un serpent, la pauvre femme avoue ce qu’on veut. Aujourd’hui encore, on peut voir des scènes semblables sur le petit écran, réalisées grâce à des exorcistes d’Eglises parallèles, et des charlatans de tout acabit. "Vous m’imaginez, ici, interpellant le diable dans ma chapelle, si possible avec lumière et présence de caméras de TV? Ce serait la crise d’hystéro-épilepsie assurée!" 
Les exorcistes ne croiraient-ils plus au diable? "J’essaie de faire ce que font 90% des exorcistes en France, explique le père Costel, être avant tout un homme qui accueille, et ramasse quelqu’un parfois dans un drôle d’état... comme un bon Samaritain."
Il s’agit d’abord d’exorciser la peur de celui qui vient consulter: "Quand la souffrance s’abat sur vous et semble s’acharner, l’esprit humain est ainsi fait, qu’à défaut de remèdes, il cherche des coupables. Et si un marabout vous annonce que "Vous êtes écrasé par un sort", que vous allez vivre une scène de ménage, ou un accident, vous n’aurez de cesse que cela arrive, et ce sera alors presque un soulagement. Quand la victime est au courant qu’on fait quelque chose contre elle, elle est déjà fragilisée. Il y a des paroles qui tuent."
Très souvent, même s’ils ne le reconnaissent pas tout de suite, les "clients" de l’exorciste sont déjà passés entre les mains d’un sorcier, d’une voyante ou d’un marabout –"tous en recrudescence, et qui n’ont jamais autant parlé de sorcellerie", remarque Isidore Froc, l’exorciste de Rennes. Souvent, le marabout en question les a confortés dans leur impression d’envoûtement...
L’exorciste doit donc d’abord accueillir et écouter une histoire . "Avant tout, il s’agit d’entendre, et ne jamais nier d’emblée les explications avancées, même si on ne les cautionne pas. Ne se moquer de personne, car, en face de nous, nous avons d’abord quelqu’un qui souffre." Il y a cette femme persuadée d’être envoûtée par la maîtresse de son mari, cette autre convaincue que le démon persécute son enfant anorexique, cette autre encore qui a subi huit exorcismes successifs de la part d’une guérisseuse, et tous attendant d’une façon ou d’une autre des gestes magiques... "Les gens apportent parfois les photos de leurs proches, raconte Louis Costel. Peut-être pour que nous agissions de façon magique sur elles, mais pourquoi mépriserait-on ce geste de confiance? Une photo, c’est plus qu’un bout de carton, c’est aussi une invitation à entrer dans l’intimité des gens. Peu à peu, nous arrivons à leur dire qu’ils sont aimés de Dieu là où ils en sont. A leur faire découvrir une présence aimante à laquelle on peut s’adresser. A dire Notre Père... A la fin de l’entretien, il y a toujours la prière liturgique, dont j’explique le sens. Nous lisons un passage de la Bible, j’explique que la prière n’est pas réservée à l’église, qu’on peut prier partout." Dans l’Ouest, les exorcistes remettent à leurs visiteurs un petit recueil de prières. Cela va du Notre Père, la prière d’exorcisme par excellence –Délivre-nous du mal est traduit, pour les Eglises orientales par Délivre-nous du Malin– jusqu’à un choix de psaumes qui disent la supplication de l’homme souffrant vers Dieu, et qui sont l’écho universel de la détresse la plus profonde.
Le diable? Louis Costel préfère parler de l’esprit du mal. "Plus on avance et moins on croit à un démon qui fait du spectacle. J’aime plutôt reprendre les mots de PaulVI : le diable, il est là où il y a le froid, la haine. La haine, voilà pour moi la "vertu" essentielle du diable, car elle peut avoir des effets, même physiques. On peut rayonner la haine comme on rayonne la bonté. C’est pourquoi je dis aux gens qui pensent subir l’envoûtement de quelqu’un qui les hait: "Enlevez au moins la haine de votre côté."" Le diable, on en parle moins qu’on pourrait le croire chez l’exorciste. "Les gens invoquent plutôt les ondes, le paranormal, des "pouvoirs". Le diable n’est pas directement mis en cause", explique le père Jacques Reymond, exorciste du diocèse de Paris.

quand l’exorciste expédiait ses "clients" en dix minutes... 

On pourrait croire que les histoires d’envoûtement sont réservées à une campagne jugée arriérée, à la France "en sabots". Pas du tout. Le service d’exorcisme de Paris et l’Ile-de-France, l’accueil Saint-Irénée, compte quatorze personnes: quatre prêtres, quatre religieuses et six laïcs, assistés d’un psychanalyste qu’ils rencontrent une fois par mois. Le service reçoit autour de 1200 personnes par an. "Il y a une inquiétude plus grande chez les gens, on sent une recrudescence de la magie, de l’angoisse", reconnaît le père Reymond. A Paris, s’il y a toujours eu des exorcistes, les méthodes ont bien évolué. Autrefois, on faisait la queue pendant des heures à l’évêché pour voir l’exorciste qui expédiait ses clients en dix minutes. Le temps d’une prière et d’une aspersion d’eau bénite. Aujourd’hui, on pénètre dans un grand hall calme et baigné de lumière, aux murs blancs ornés de magnifiques icônes. Le visiteur attend derrière une claire-voie de bois, qui rappelle une clôture. Devant, un bouquet de fleurs et, au mur, cette phrase du Christ: "Je suis la résurrection et la vie." Au fond, une chapelle empreinte de la même sérénité, où veille une statue de la Vierge et où se terminent la plupart du temps les entretiens, qui durent le temps nécessaire. 

satan? il n’a de pouvoir que grâce aux hommes...

Un quart des visiteurs ont moins de trente ans, et ils viennent de tous les milieux. "Chaque cas est particulier, et toute personne doit être reçue pour elle-même et dans son problème", insiste le père Reymond, qui répugne à dresser des typologies. "Nous voyons des jeunes qui ont trop joué avec le spiritisme. "L’esprit", sympathique au début, devient peu à peu "méchant", et conduit là où on ne voudrait pas aller." Un phénomène de transfert qui peut mener loin. Témoins ces collégiennes auxquelles le pseudo-esprit intimait d’embrasser les verres qu’elles faisaient tourner, et annonçait la mort prochaine de l’une d’entre elles. "Ce sont souvent des gens qui ont perdu leurs repères, qui se trouvent dans une situation psychologique fragile, qui ont à faire le deuil d’une personne qui leur était proche, ou qui projettent la responsabilité de leur désarroi sur leurs proches. Combien de belles-mères sont des sorcières pour leurs belles-filles, et vice versa! Parfois, ces gens attendent de nous un geste magique, un grand exorcisme, et repartent déçus. Ils n’ont pas été inondés d’eau bénite, on ne les a pas fait manger de sel, on n’a pas poussé de grands cris. Mais ils ont pu se raconter, ils ont pu découvrir le don de l’amour de Dieu."
Il arrive que les exorcistes, décelant un problème psychologique, renvoient à un médecin, un psychiatre ou un psychologue. Tout se 
résoudrait-il par la psychologie dans les manifestations "diaboliques"? "Tout est psychologique, mais rien n’est seulement psychologique, répond le père Reymond. Il ne faut jamais oublier la dimension spirituelle et surnaturelle. Des gens, par exemple, sont rongés par des ulcères simplement parce qu’ils ne savent pas pardonner. Et on voit bien, pour ceux qui sont soignés en hôpital psychiatrique, combien les soins ne suffisent pas. Ces gens ont aussi besoin d’accueil , ils sont aimés de Dieu. Quand on me demande: "Le diable, vous y croyez ou pas?", je renverse la question: Je crois en Dieu, et j’essaie de voir. Il ne faut pas "diviniser" le diable. Mais Satan, qui est le refus de Dieu, n’a de pouvoir que grâce aux hommes. Ce sont eux qui font que le mal existe. La communion avec l’esprit du mal existe, comme la perversité profonde, et c’est la chose la plus effrayante que j’aie eu à rencontrer."
Peut-on, dans ces cas extrêmes, parler de possession diabolique? "Je crois que le diable peut investir une personne, "l’infester", mais il n’est jamais totalement propriétaire d’un individu, répond Jacques Reymond. Dieu ne nous a pas faits objets et, quel que soit l’état d’une personne et sa collusion avec le mal, elle a la possibilité de rencontrer Dieu et de recevoir le pardon." Rares sont les exorcistes qui "voient le diable partout". "Ces maniaques du diable sont à peu près 2%, dont deux ou trois sombrent dans la pathologie", commente le père Reymond. Le rituel recommande d’ailleurs la plus grande prudence : seul un exorciste investi peut le pratiquer, avec autorisation spéciale de son évêque et après avoir pris l’avis de médecins. Trois critères avaient été fixés pour discerner la possession, mais ils semblent en partie caducs de nos jours. La possibilité de parler en langues étrangères? On cite le cas de personnes qui, en proie à des accès de délire, peuvent se remémorer avec précision des phrases entendues dans des langues qu’elles ne connaissent pas. Une force extraordinaire? On sait qu’en cas d’hystérie la force est fréquemment décuplée. La connaissance de faits que le sujet devrait ignorer? Un phénomène qui ne nécessite pas la possession. D’où la grande réserve requise. 
Il y a aussi les phénomènes étranges... Maisons qui dégagent par moments une odeur bizarre, adolescentes dont la seule présence provoque des manifestations déroutantes: des conduits d’eau qui fuient, des pierres qui tombent... Le paranormal existe bel et bien. "Il y a des tas de phénomènes que nous sommes incapables d’expliquer à l’heure actuelle, que nous comprendrons peut-être plus tard. De là à y voir la main du diable...", répond Louis Costel qui en a vu d’autres. La plupart des exorcistes adoptent la même sérénité. En psychiatrie, on connaît de nombreux cas de jeunes filles qui, au moment de la puberté, entraînent des phénomènes de ce type. Pour inquiétants qu’ils soient, les symptômes disparaissent au bout de quelque temps. Il n’empêche... 
François Dunois Canette, journaliste, qui a enquêté pendant plusieurs mois pour son livre Les prêtres exorcistes, sillonnant la France à leur rencontre, avoue "s’être fait peur plusieurs fois"... Maison hantée, séance d’exorcisme spectaculaire à laquelle il est convié au dernier moment, il en a vu! De quoi être dérouté. 
"Ce qui m’a frappé, dit-il, c’est de voir aujourd’hui ces résurgences de sorcellerie, de croyance aux envoûtements. L’Eglise des premiers siècles combattait cette religiosité basée sur la peur, qui revient au premier plan, alors que les églises se vident. Autre étonnement: le recours à l’exorciste est plutôt un phénomène urbain et concerne pas mal de gens à formation scientifique. Je me souviens d’un ingénieur demandant des statistiques sur la consécration de l’hostie et voulant savoir si "ça marchait à tous les coups". C’est symptomatique: les gens veulent aujourd’hui des certitudes, presque comptabilisables, ils voudraient tout maîtriser, et angoissent de ne pas y parvenir."
Le journaliste a rencontré aussi bien les exorcistes, minoritaires, "qui ont tendance à voir le diable partout", que ceux qui font preuve d’une grande prudence. L’antagonisme est parfois très net. C’est ce prêtre, partisan d’une pratique forte de l’exorcisme, qui affirme qu’à la réunion annuelle des prêtres exorcistes, les "pratiquants" sont marginalisés. Beaucoup refusent cette vision manichéenne, "pratiquants" contre "psychologisants", à l’instar du père Lagoutte, secrétaire général de la Conférence des évêques, chargé des questions pastorales, et, à ce titre, en contact régulier avec les exorcistes: "Je ne veux pas opposer les uns aux autres. Certains interprètent vite dans le registre spirituel, d’autres pensent qu’il faut mener un dialogue humain très prolongé. C’est plutôt une question de tempérament, de méthode d’interprétation."
"Il y a bien longtemps qu’on est sorti du tout-psychologique, explique Isidore Froc, de Rennes. C’est seulement dans des cas extrêmes que nous renvoyons les gens aux psychiatres. Et, si je travaille effectivement avec les conseils de médecins et de psychiatres, c’est parce qu’ils nous aident nous-mêmes à réfléchir sur certains cas. Jamais ils ne nous dictent l’attitude à tenir."

"finalement, être envoûté ou pas, Ça ne dépendait que de moi"

Le jeune exorciste d’Angoulême et de La Rochelle, le père Jean-Pierre Larsonneur, quarante-trois ans, refuse lui aussi d’opposer le regard psychologique au regard spirituel. "C’est à travers les failles psychologiques de la personne que le Malin peut s’infiltrer." S’il est convaincu qu’il y a bien des "forces spirituelles qui s’opposent au dessein de Dieu, et qui peuvent utiliser tous les moyens", lui non plus n’a jamais rencontré de cas de possession en sept ans de ministère –"une personne peut-elle être totalement aliénée dans sa liberté?"– et il n’accepte pas de voir le diabolique partout. Proche du Renouveau charismatique, il n’a jamais vu de ces prières de délivrance échevelées pratiquées par certains groupes charismatiques, et que réprouvent à voix basse nombre d’exorcistes. Une seule fois, dans le cas d’un jeune homme très perturbé, baignant depuis l’enfance dans une ambiance de sorcellerie et d’ésotérisme, et persuadé d’être possédé, il s’est interrogé. "J’ai fait alors appel à des personnes du Renouveau reconnues pour leur charisme, qui sont venues prier avec lui, et lui ont apporté un véritable apaisement. C’était exceptionnel, mais je ne suis pas contre cette forme de prière." Psychologue clinicien de formation, et également aumônier d’hôpital psychiatrique, il a choisi de faire équipe avec trois laïcs: un médecin généraliste, une psychologue psychothérapeute et une assistante sociale, elle aussi psychothérapeute. Un modèle qu’il voudrait voir se développer ailleurs en France pour éviter l’isolement du prêtre exorciste (certains craquent sous le poids de l’angoisse déchargée sur eux) et lui permettre de bénéficier de compétences d’une équipe pluridisciplinaire. "Nous travaillons entre les domaines psychologiques et spirituels, explique José Gomes, le médecin de l’équipe. Et je suis persuadé qu’il faut prendre les trois dimensions de la personne en compte: corps, psychisme et spiritualité, les trois sont indissolublement liés. Lorsqu’il m’arrive de recommander à quelqu’un de consulter un médecin ou un psy, ce qui n’est pas fréquent, ça n’est jamais sans suggérer un accompagnement spirituel." Son espoir? Sensibiliser les médecins généralistes pour qu’ils sachent entendre les angoisses spirituelles de leurs patients et ne pas les laisser vagabonder de guérisseur en désenvoûteur de tout poil vers une plus grande aliénation. 
"Aux gens polarisés sur le diable, je demande de se polariser plutôt sur la confiance de Dieu, explique Jean-Pierre Larsonneur. Je me souviens d’un jeune venu pour se faire "désenvoûter", et reparti heureux, en disant: "Finalement, être envoûté ou pas, ça dépend de moi!" Le véritable enjeu, c’est de rendre sa liberté à la personne, de mettre l’homme debout, de le responsabiliser, et de lui faire retrouver la confiance au Christ."




SOS EXORCISTE

Que faire devant des phénomènes étranges et inquiétants, devant une personne de son entourage qui parle de possession, de sorcellerie ou d’envoûtement, devant une impression de présence "diabolique"? Chaque diocèse dispose d’un service d’exorcisme ou d’un prêtre exorciste. L’évêché dont vous dépendez, et dont vous trouverez l’adresse sur 3615 Gabriel, pourra vous transmettre leurs coordonnées.



Le diable, qu’en dire?

Asmodée, Lilith, le Serpent, Satan, Belzébul, l’adversaire, le séducteur, l’homicide, le menteur, le Prince du monde. On n’en finit pas de recenser les noms donnés au diable dans l’Ancien puis le Nouveau Testament. Le Satan du Livre de Job fait partie de la cour divine. Tout autres sont les dragons de l’Apocalypse, les anges déchus du Livre d’Hénoch, une œuvre du judaïsme tardif, ou bien les démons exorcisés par Jésus, qui rentrent dans un troupeau de cochons pour se jeter dans la mer... Souvent, ces passages laissent perplexe. Symboles, personnalisations du Mal, du démoniaque éternel? 
Personne ne se représente plus le diable cornu et griffu, ou comme des "légions" de démons. Jésus vivait dans son époque, le judaïsme tardif qui, de son exil à Babylone, avait emprunté bien des figures du mal à la religion de l’autre. Il en adopte les conceptions et le langage, notamment l’interprétation de maladies psychiques comme l’œuvre du démon, mais sans jamais céder au spectaculaire quand il exorcise. Et le sens de ses gestes est clair: "Jésus est là pour libérer les hommes de ces puissances qui les asservissent, les terrorisent et leur portent malheur", explique le théologien René Marlé, qui a participé à plusieurs rencontres d’exorcistes.
La Bible rejette le dualisme, tout manichéisme qui pourrait faire du diable une puissance égale à celle de Dieu. Le serpent d’Adam et d’Eve fait partie de la création, mais "sa caractéristique ne pourrait-elle pas être de toujours glisser entre les mains de ceux qui voudraient s’en saisir?" remarque le théologien.
Puissances du mal, Esprit du mal, mystère du mal, le diable glisse, justement, entre les mains des théologiens tâtonnant à la recherche d’une interprétation. Le texte de 1975 de la Congrégation pour la Doctrine de la foi cite des paroles de Paul VI: "Le mal est le fait d’un être vivant, spirituel, perverti 
et corrupteur." Le nouveau catéchisme (n°2851) commente ainsi la phrase "Délivre-nous du mal", de Notre Père: "Dans cette demande, le Mal n’est pas une abstraction, mais il désigne une personne, Satan, le Mauvais, l’Ange qui s’oppose à Dieu."
Mais il apparaît difficile de parler de "personne", car "ce terme est par excellence appliqué à Dieu et à l’homme, créé à son image", et suppose une "inaliénable dignité", remarque René Marlé. Il préfère reprendre les termes employés en 1973 par celui qui allait devenir le cardinal Ratzinger : le diable est plutôt une "non-personne, voire une antipersonne", parce qu’il est "la désintégration, la ruine de l’être-personne", celui qui se présente sans visage, qui refuse de se laisser reconnaître.




06/01/2012
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